ISAAC ou le premier vrai coup d’vent de la saison

Elles se suivent, les unes derrières les autres à 4 jours d’intervalles environ, elles partent d’Afrique, du Mali, de Côte-d’Ivoire, de Mauritanie, du Sahara ; elles traversent l’atlantique d’est en ouest, se gonflent de vent et de pluie puis abordent les Antilles avec plus ou moins de folies dans leur ventre, elles continuent leur course en s’inclinant vers le nord ou toujours vers l’ouest et viennent frapper durement l’Amérique Centrale, les Grandes Antilles ou le sud des Etats-Unis… ce sont les dépressions. Appelées par ordre de « rage » : Ondes tropicales, dépressions tropicales, tempêtes tropicales, cyclones (Hurricane en anglais : Niv. 1,2,3,4,5).

La saison des cyclones commence en juillet et se termine en novembre. La période vraiment critique se situe d’août à octobre, 3 mois durant lesquels il faut être vigilant, écouter la météo tous les jours et consulter internet pour visualiser la trajectoire des dépressions. L’organisme américain NOAA est la référence en terme de suivi et leur site reste le plus fiable.
Sur terre comme sur mer, il faut se préparer en cas de coup dur. En plus des vents parfois violents, il faut compter avec les pluies torrentielles pour les terriens et la houle ou Raz de marées pour les gens de mer.

En ce qui concerne les « marins », il y a deux grandes catégories : les chanceux qui ont le temps et qui descendent vers les îles du sud Caraïbes et le Vénézuela pour passer 3 mois au soleil dans les lagons et ceux qui doivent rester sur place pour leur travail. Nous faisons partie de la deuxième catégorie (cette année !!). Le choix de la sécurité à la Marina, amarrage sur ponton, s’est trouvé judicieux. Bien qu’en cas de forte houle le bateau serait certainement mieux protégé le nez dans la mangrove.

C’est notre neuvième alerte depuis début août ; les autres dépressions ont soit faibli soit donné du nord dans leur trajectoire. Depuis lundi nous savions que celle-ci serait pour nous, en partie.

Isaac nous a secoué en fin de soirée et pendant la nuit. Le claquement des cordages, le sifflement des haubans ajoutent une dimension sonore plus impressionnante que la force vraie du vent. En fait, rien de bien méchant, il fallait juste porter attention à ses amarres, fermer toutes les ouvertures et attendre tranquillement, dans la quiétude du carré, que le mauvais temps passe… ça fini toujours par passer !!

Nous souhaitons juste que la saison se poursuive comme ça. Au dire des Martiniquais, mieux vaut ne jamais connaître de cyclone ; beaucoup parle de Dean (2007. Photo ci-contre) et en sont resté choqué.

Deux autres « dép. » viennent de quitter le Cap Vert et font routes vers les Antilles.
La ronde continue…

A l'heure où je publie ces lignes Isaac s'est transformé en cyclone et frappe durement Haïti. Une pensée pour les amis Haïtiens.

Au quotidien...

Pour faire taire ceux qui croient que nous sommes en vacances perpétuelles, voici un aperçu de nos journées respectives :

Commençons par Sandrine, le réveil sonne à 5h15 (du coup pour moi aussi), soupirs de mécontentement, toilette et maquillage… ½ heure après (incroyable pour une fille mais c’est la preuve que tout arrive) nous sautons dans l’annexe pour rejoindre le ponton le plus proche.
Elle démarre sa voiture puis se farci ¾ d’heure de route pour arriver à l’Hôpital de La Meynard (FDF).

La route, parlons-en : une deux voies en bonne état mais très très fréquentée ; si vous partez avec quelques minutes de retard vous êtes bon pour passer ½ heure de plus dans les embouteillages en arrivant sur Fort de France. Ça commence de ralentir 15 kms avant la ville puis chaque entrée amène son lot supplémentaire de véhicules. C’est un vrai casse-tête jusqu’à 10h du matin et ça recommence l’après-midi à partir de 15h… un petit air de Paris quoi !

Le sac tombe sur le bureau et c’est une nouvelle journée qui s’éternise devant l’écran de l’ordinateur... !!!! Seul le bon salaire motive, c’est pas mal mais pas très épanouissant !
Elle voyait ça autrement le service qualité mais à part des heures sur le clavier à établir des protocoles et faire aboutir des normes (dont tout le monde s’en fout), y a pas de quoi s’extasier ! Ou alors, faut avoir l’esprit « bureaucrate » qui va avec !
Au bout de ses 7h contractuelles, 14h30 sonne, elle fait le chemin inverse, sous le soleil, en pensant déjà au plaisir de glisser dans l’eau dès qu’elle aura mis le pied sur le bateau.
Nous nous retrouvons sur le ponton, un ptit tour d’annexe et… la deuxième journée commence !!! (cf. l’article « Fin de journée à bord »).
Vous l’aurez compris, elle va essayer de tenir jusqu’au bout mais nous sommes déjà en réflexion sur la suite. Changer complètement de boulot, commencer une formation, prendre une année sabbatique…tout reste envisageable. Ça faisait déjà 3 ans que ça couvait, cette fois la coupe est pleine. Début mars 2013 elle aura fait ses un an obligatoire (sans quoi elle est redevable de l’investissement de mutation), nous pourrons donc envisager une suite différente en Martinique ou changer de lieu aux alentours de mai, juin 2013 suivant mes chantiers. L’avantage de vivre sur un bateau c’est que nous pouvons poser notre maison au gré des envies !

De mon côté, c’est un peu différent : il m’a fallu quatre mois avant de me faire connaître et de décrocher des chantiers intéressants et lucratifs.
Bon, pour le matin c’est sensiblement pareil que Sandrine, le maquillage en moins.
Ensuite, je m’arrange pour prévoir les déplacements pour l’achat de matériaux en fonction de la densité de véhicules. Un mauvais itinéraire ou un oubli peut me faire perdre la matinée.
(Photos du Lagoon 620 sur lequel j'ai travaillé en Juillet).
 
J’ai deux types de chantiers : menuiserie marine sur les bateaux à la Marina du Marin ou menuiseries extérieures et petites charpentes en sous-traitance pour l’ONF (Office National des Forêts).

Actuellement je rénove le sentier d’interprétation (observation des oiseaux) sur l’étang des Salines (pointe sud de Martinique). Remplacement des platelages, des gardes-corps et main-courantes, des tablettes d’observation de la faune, etc… Je suis complètement isolé au milieu de la nature. La plage des Salines (la plus belle de l’île, d’après les guides) est juste de l’autre côté des Palétuviers (je casse la croûte les pieds dans l’eau au milieu de touristes qui ont payés cher leurs billets d’avion et l’hôtel pour s’offrir ce luxe). Je scie, je rabote, je visse, je découpe et j’assemble des pièces de bois en Pin du Canada ou en bois rouge du Brésil. Seul le ronronnement de mon groupe électrogène pour alimenter mes machines brise la quiétude des lieux.
Ce travail peut sembler agréable mais il faut tout de même imaginer que je suis souvent obligé de m’immerger jusqu’à la taille (j’ai une protection type pêcheur) dans la mangrove pour démonter et remonter des poteaux (les mains aveugles au milieu de serpents d’eau, des crabes, des lézards, des Orphies,…). De plus, le soleil qui semble l’ami du vacancier se transforme pour moi en problème supplémentaire car la chaleur m’écrase à chaque coup de marteau et le soleil réverbère fortement sa lumière tout autour de moi… pas facile de travailler avec une paire de lunette de soleil sur le nez.
Vers 15h30 je retrouve Sandrine et …cf. l’article etc… vous avez compris !

Le prochain chantier sera sur un Catamaran au ponton de la Marina et celui d’après se trouve au centre de l’île, dans la petite ville de St Joseph, c’est un hangar de 58m2 en ossature bois (avec toiture, bardage et ouvertures) que je dois construire, toujours pour l’ONF. Mon travail est intéressant et enrichissant, je ne me plains pas.

Si les choses se passent bien, décembre sera là et nous lèverons l’ancre pour 3 semaines, cap au sud… Les Grenadines, les Tobago Cays.

En attendant, Sandrine doit trouver sa voie et moi je dois finir mes chantiers.

Le Tour des Yoles

C’est LA manifestation sportive de l’année.
 
Pendant une semaine, la Martinique vit au rythme des 7 étapes (régates) qui font le tour complet de l’île.
Bon nombre de Martiniquais prennent une semaine de vacances pour suivre Le Tour.

Comme dans toutes les épreuves sportives, les sponsors ont donné leurs noms aux équipages :
Brasserie Lorraine/Izusu (la fameuse blonde du Lamentin), UFR/Chanflor (l’université en partenariat avec l’eau de source locale), Rosette/Orange (Pièces détachées Auto et téléphonie), GFA/Digicel (assurance et téléphonie des Caraïbes), Joseph Cotrell (Tout pour le bâtiment, ommiprésent en Martinique), Dr Roots/Zapetti, etc…

 Un peu d’histoire :
A l'origine, le gommier était l'embarcation des marins pêcheurs de la Martinique, ce bateau était construit dans un arbre qui portait le même nom, il était creusé puis taillé. Le nombre de pêcheurs augmentant la fabrication des gommiers devint un véritable problème car le gommier s'épuisait dans les forêts martiniquaises. Pour la fabrication de leurs embarcations les marins pêcheurs allèrent chercher les arbres sur les îles voisines de Ste Lucie et la Dominique.
La Yole Ronde fut créée dans les années 40, par un charpentier du François en s'inspirant à la fois du gommier et de la yole européenne. A cette époque les pêcheurs utilisaient principalement la voile pour revenir de leur lieu de travail et arriver en premier pour vendre le produit de la pêche. Ensuite des courses sauvages fûrent organisées le dimanche puis les courses s'amplifièrent lors des fêtes patronales du François, du Robert, du Vauclin. L'intérêt grandissant pour ces manifestations c'est ainsi que naquit la "Société des Yoles et Gommiers de la Martinique" en 1972. En 1984 les gommiers se séparèrent des yoles et " La Société des Yoles Rondes de la Martinique" fut créée.
La yole actuelle est devenue une véritable oeuvre d' art. La construction doit être en bois massif et ne pas dépasser 10.50 m. Les 2 voiles couvrent environ 100m2 de surface. La yole est une embarcation étroite; effilée, légère et très rapide, sans quille, sans leste, sans dérive ni gouvernail fixe. Elle est conçue par assemblage de planches, ou bordés, fixées horizontalement sur une ossature faite de membres. Le nombre d'équipiers varie entre 15 et 18.

Ce sport unique au monde que les martiniquais se sont appropriés, attire chaque fois une foule immense du supporters.

La 28 ème édition fût chargée en émotions (dessalage spectaculaire d’UFR/Chanflor, étape annulée en raison du mauvais temps,…). La victoire revient à Brasserie Lorraine/ Izusu.

L’ambiance pendant la course est débridée et des centaines de bateaux suiveurs se postent à l’arrivée de chaque étape pour accompagner la fête…très débridée elle aussi !!.